Aujourd’hui, la psychologie et la psychiatrie sont de plus en plus médiatisées. Ceci permet d’un côté d’informer les personnes, de proposer une vulgarisation accessible et de sensibiliser. D’un autre côté, cela induit parfois des représentations erronées des différentes appellations et des demandes de diagnostics très coûteux pour les personnes (tant sur le plan psychique que sur le plan financier).
Aujourd’hui également, il me semble que nous sommes de plus en plus nombreux à nous sentir différents, en décalage, d’une certaine norme sociale ou médiatique. Il est alors légitime d’aller chercher une réponse dans un diagnostic, une étiquette, qui puisse nous caractériser et mettre du sens sur ce vécu de différence si douloureux.
Si le vécu de décalage peut, pour certains, correspondre à une atypicité de fonctionnement, ce n’est pas toujours le cas.
J’ai donc souhaité clarifier ici certaines notions « psy » médiatisées. Je mesure que je m’aventure peut-être dans un sujet qui fait débat, qui fait parfois débat houleux, mais il m’importe d’apporter un peu de clarté, en tout cas celle qui correspond à ma pratique de psychologue.
LE HPI : DIAGNOSTIC OU PAS DIAGNOSTIC ?
Le Haut Potentiel Intellectuel correspond à une identification au test de QI. Il n’est pas un diagnostic médical et il n’est pas considéré comme un handicap.
Classiquement, en psychologie, nous définissons l’intelligence comme une capacité d’adaptation (qu’ensuite nous utilisons ou pas, en fonction d’autres facteurs comme l’histoire de vie, le tempérament, d’éventuelles particularités cognitives, etc.). Les psychologues ont recherché les habiletés intellectuelles nous permettant de nous adapter. A partir de là, le test de QI a été créé. Il est un test statistique ré-édité régulièrement. Pour le construire, on sollicite un échantillon représentatif de la population pour chaque tranche d’âge. On répartit ensuite la performance de ces personnes selon une courbe de Gauss (= courbe en cloche). Ensuite, la performance à chaque exercice (et dans chaque domaine) de chaque personne qui passe le test est comparée à la performance des personnes de sa tranche d’âge. En résumé, on situe la performance de la personne qui passe le test sur la courbe en cloche. La définition du HPI est : QI Total supérieur à 130, ce qui correspond à 2,2% de la population. En France (ce n’est pas forcément le cas dans certains autres pays), certains professionnels associent le HPI à des caractéristiques de personnalité. L’identification se fait parfois sur le style de personnalité. Ceci est une interprétation psychologique qui, me semble-t-il, doit être prise avec grande prudence et peut mener à des biais de représentation de soi. Seul le test de QI permet de valider le HPI.
Et les zèbres dans tout cela ? Le HPI a reçu plusieurs appellations. (Sur)douance, précocité, HP, HPI, HQI et zèbres. Toutes ces appellations renvoient, à mes yeux, à la même chose, à la même notion. J’utilise généralement, pour ma part, HQI (traduction littérale de ce qu’on cherche à signifier : Haut Quotient Intellectuel) ou, préférentiellement, HPI car c’est la terminologie qui me parait la plus proche du factuel : un potentiel intellectuel mesurable, qui sera ensuite utilisé ou pas. Parfois, on parle de HP tout court. La notion de (sur)douance me semble connotée (bien que je l’utilise ponctuellement) et la notion de précocité peu signifiante pour les adultes. Quant à la terminologie « zèbre », elle me semble associée à des représentations « psy » que je ne partage pas… et puis, bien qu’en tant qu’humain nous soyons également des animaux, notre cognition n’est toutefois pas tout à fait la même 😉
Ouvrages de référence : « Le Haut Potentiel en questions » de Sophie Brasseur et Catherine Cuche, « Les surdoués ordinaires » de Nicolas Gauvrit
Les informations sur mes bilans psychologiques pour le HPI : https://www.estellejoguet-psychologue.fr/index.php/douance-psychologue-lambersart/
LE HPE : DIAGNOSTIC OU PAS DIAGNOSTIC ?
Le Haut Potentiel Emotionnel est une notion dont on parle de plus en plus. A ma connaissance, il est une notion qui n’est pas encore définie sur le plan scientifique et qui ne fait pas consensus parmi les professionnels de la psychologie. De ce fait, il n’existe pas, à ma connaissance, de test valide permettant de l’évaluer de façon fiable.
Parfois, il est évalué de façon dite « clinique », c’est-à-dire issue de l’interprétation ou de la représentation que le psychologue s’en fait. Il y a donc un aspect subjectif. Parfois, il est évalué avec des tests prévus pour mesurer autre chose. Par exemple, j’ai vu l’utilisation en ce sens du questionnaire EQ (= quotient d’empathie). Or, ce questionnaire a été prévu et validé dans le dépistage des troubles autistiques. Le questionnaire EQ a un seuil qui permet d’évaluer à partir de quand il y a des difficultés d’empathie qui peuvent nécessiter de faire un bilan pour explorer la piste autistique. En aucun cas il n’a été construit et validé pour mesurer un HPE. Pour faire une métaphore, c’est un peu comme si on souhaitait mesurer la température corporelle avec un thermomètre dont la plage de température va de 0 à 30 degrés en décidant que 25 degrés correspondait à une température corporelle normale.
Il est tout à fait possible que le HPE existe réellement : beaucoup de caractéristiques humaines peuvent être réparties sur une courbe en cloche comme pour le HPI. Simplement, pour pouvoir l’évaluer, il est d’abord nécessaire qu’il y ait accord sur sa définition et qu’un outil fiable et valide permette de le mesurer. C’est de la recherche scientifique en psychologie que viendront les réponses.
LE TSA : DIAGNOSTIC OU PAS DIAGNOSTIC ?
Le TSA (Trouble du Spectre de l’Autisme) est un diagnostic médical, répertorié dans un répertoire médical comme le DSM-V. Le TSA est considéré comme un TND (Trouble Neuro-Développemental). Seul un médecin, généralement (pédo)psychiatre, est habilité à poser le diagnostic, à partir de bilans pluriprofessionnels. Le TSA peut être reconnu comme un handicap, il est ainsi possible de déposer un dossier auprès de la MDPH (Maison Départementale pour les Personnes en situation de Handicap), au sens où il nécessite que l’environnement soit aménagé pour permettre aux personnes avec TSA de disposer des mêmes chances que les autres de construire leur vie.
L’on peut se sentir différent et ne pas avoir un TSA, l’on peut se sentir différent et avoir un TSA. Le TSA englobe plusieurs particularités de la communication sociale, des comportements / intérêts et de la sensorialité. Il existe généralement trois étapes pour le diagnostic :
- Le repérage : par la personne elle-même, les parents, des professionnels de santé ou des enseignants…
- Le dépistage : par des questionnaires et échelles, parfois accessibles sur internet et qui ne suffisent pas à poser un diagnostic
- Le diagnostic : qui nécessite en premier lieu une consultation médicale spécialisée, puis des bilans souvent pluridisciplinaires qui vont aider le médecin dans sa démarche diagnostique.
Les personnes avec TSA nécessitent un accompagnement psychologique spécifique, les aidant à décoder notre monde social. La prévisibilité, la structuration et la clarté de l’environnement, y compris social, sont essentielles. Il est également nécessaire d’avoir recours à des aménagements sensoriels.
A noter qu’à l’âge adulte, le diagnostic de TSA peut être très difficile à poser. En effet, d’un côté, la personne concernée a pu développer des souffrances et vivre des événements qui ont généré des troubles psychiques (souvent anxio-dépressifs) qui compliquent la démarche diagnostique. D’un autre côté, la personne concernée a pu aussi développer des stratégies d’adaptation et de compensation lui donnant des outils pour s’adapter et atténuer l’expression des caractéristiques autistiques, ce qui complique la démarche diagnostique.
Pour plus d’informations, contactez le CRA de votre région : https://gncra.fr/
En Nord Pas-de-Calais : https://www.cra-npdc.fr/
Mes bilans, après adressage par un médecin spécialisé qui peut conclure sur le plan diagnostique : https://www.estellejoguet-psychologue.fr/index.php/2018/08/27/information-bilans-pre-diagnostiques-autisme/
Ma page autisme : https://www.estellejoguet-psychologue.fr/index.php/autisme-psychologue-lambersart/
LE TDA(H) : DIAGNOSTIC OU PAS DIAGNOSTIC ?
Le TDA(H) (Trouble Déficitaire de l’Attention, avec ou sans Hyperactivité) est un diagnostic médical, répertorié dans le DSM-V. Le TDA(H) est considéré comme un TND (Trouble Neuro-Développemental). Seul un médecin, généralement (pédo)psychiatre, est habilité à poser le diagnostic. Le TDA(H) peut être reconnu comme un handicap par la MDPH, au sens où il nécessite que l’environnement soit aménagé pour permettre aux personnes de disposer des mêmes chances que les autres de construire leur vie.
Le diagnostic est posé par un médecin, préférentiellement (mais pas systématiquement) sur la base d’un bilan neuropsychologique, qui peut comporter un test de QI, un bilan attentionnel, de mémoire et des fonctions exécutives (= organisation, planification, impulsivité, etc.). A noter que les neuropsychologues sont des psychologues ayant eu, en fin de cursus, une spécialisation en neuropsychologie. De mon côté, je suis psychologue clinicienne, ce qui est différent, j’ai reçu en fin de cursus une spécialisation dans le domaine de la psychothérapie et de la psychopathologie.
Chez les enfants, un traitement existe par psychostimulant, il est aussi parfois prescrit chez les adultes. Le cerveau des personnes ayant un TDA(H) a besoin d’être stimulé. Une fois la stimulation suffisante, l’agitation et l’impulsivité s’apaisent un peu, la concentration se mobilise et la régulation émotionnelle s’améliore. Il existe aussi des prises en charge spécifiques, type remédiation cognitive par les neuropsychologues ou thérapies émotionnelles-cognitivo-comportementales par les psychologues formées. Comme pour le TSA, mais de façon spécifique au TDA(H), l’environnement peut être aménagé pour limiter la distractibilité et l’impulsivité.
A noter qu’à l’âge adulte, il peut être difficile de poser le diagnostic, pour les mêmes raisons que celles évoquées pour le TSA.
AUTRES DIAGNOSTICS ET PAS-DIAGNOSTICS
Si ces appellations sont les plus médiatisées, d’autres restent bien plus discrètes dans nos médias, comme le Trouble de la Communication Sociale ou le Trouble Développemental de la Coordination, qui sont également des TND répertoriés dans le DSM-V. Et n’oublions pas les difficultés qui sont passées « dans le langage courant » mais qui peuvent rester méconnues (comme la dyslexie, par exemple). Certaines personnes sont également concernées par des souffrances psychiques (type anxiété, dépression, etc.) et/ou par des traumas liés à l’histoire de vie ou aux transmissions familiales et/ou par des difficultés de structuration de la personnalité. Rappelons qu’il existe différents types de personnalités, il me semble qu’aucune ne correspond parfaitement à la norme sociale dans laquelle, me semble-t-il également, beaucoup d’entre nous se reconnaissent de moins en moins.
En conclusion, l’Humain est d’une grande complexité, d’une grande richesse… et c’est une chance !
Et puis, n’oublions pas ce qui est, à mes yeux, le plus important : chacun de nous, quelle que soit sa personnalité, son diagnostic ou son pas-diagnostic, dispose de ressources, de forces, d’élans vitaux, dans lesquelles puiser pour surmonter la souffrance et la difficulté, avec étayage d’un professionnel quand cela parait utile. Il me semble que le chemin psychothérapeutique le plus enrichissant est celui qui nous mène à nous connaitre nous-même, dans notre fonctionnement propre, dans nos besoins et nos limites, dans la manière dont nous avons besoin de rencontrer – plus ou moins – les autres et le monde. Cette connaissance de soi, nous pouvons apprendre à la réaliser sans jugement de valeur, sans comparaison aux normes sociales, nous pouvons la découvrir à travers la réflexion, l’expérience, les joies et les peines … Cette connaissance de soi là nous permet les choix de Vie qui sont les nôtres dans le respect d’autrui, les choix de Vie qui ont une chance de nous épanouir un tout petit peu plus chaque jour… Vers le sentiment d’Autonomie et vers ce merveilleux sentiment d’Etre Vivant.
Bonjour, Qu’en est-il du trouble de l’alcoolisation faetale ?
Bonjour Jean-Luc,
Je n’avais malheureusement pas vu votre commentaire et je viens d’en prendre connaissance. Je vous remercie pour celui-ci.
Je ne suis pas experte dans le domaine des conséquences liées à l’alcoolisation fœtale. Toutefois, c’est en effet un facteur de vie important, non-négligeable, quand il est présent. Il peut impacter les fonctions cognitives (l’attention, la mémoire, etc.) et (j’imagine) la vie entière.
Si vous avez des liens internet à partager sur le sujet, je serai ravie d’en lire davantage.
Bien à vous,
Estelle Joguet
Bonjour, cela fait plusieurs années que je me rends compte que je suis neurotypique.
Mes parents m’ont fait passé des test plus jeune, pour une Dyslexie, mais résultat négatifs, hors tout les signes sont là. Par contre, beaucoup de signes sont aussi présent pour un hpi ou autisme…
J’aimerais faire des test pour tous ça, savoir mettre enfin des mots sur mes problèmes avec le monde et dans ce monde. Je vis à coté de Paris. Un endroit ou médecin à me préconiser ?
Bonjour,
J’ai bien lu votre message et je vous en remercie.
Pour toute demande de bilan, vous pouvez me contacter à : estellejoguet@yahoo.fr
Je vous transmettrai l’ensemble des informations nécessaires à connaitre avant de démarrer un bilan.
Bien à vous, Estelle Joguet
Bonjour, mon petit garçon de 8 ans et demi a toujours été un peu à part à l’école avec un mal être scolaire depuis la maternelle, bien que petit bonhomme ultra drôle et heureux dans la vie (je précise brillant dans ses résultats). En arrivant en CP, il a commencé à être très angoissé et se fermant au travail scolaire, mais lorsque sa maitresse gagnait sa confiance ses résultats étaient très hauts, comme à la maison, où ce stress n’existait pas, tout était facile pour lui niveau apprentissage et résultats scolaires.
Nous l’avons donc fait testé par une pédo-psychologue et il a obtenu un résultat de 120 . Mais la psychologue nous a expliqué que notre fils était un petit hypersensible et faisait de l’anxiété de performance, qu’elle estimait ce test sous évalué. On ne pouvait donc pas exclure qu’il soit HPI. Bref, certaines années d’école sont affreuses, lorsque ses enseignants ne le comprennent pas, avec une forte autorité, une stigmatisation, voir de l’humiliation, voulu ou maladroitement non voulu. Cette année nous repartons dans ce scénario et ses professeurs le pensent mal élevé, agité, menteur, car brillant lorsqu’il le décide et oui il se reblle car il vit ce scénario comme une injustice et une incompréhension de qui il est..
Notre fils fait de plus en plus de crise d’angoisse et est malheureux avec un fort stress d’aller à l’école et une somatisation physique avec de forts maux de ventre et de tête. Que faire? Seul le sésame de précocité avéré avec un score de 130ouvre certaines portes à une compréhension et une modification de l’attitude des enseignants envers votre enfant. Mais quand un HPI rate son test, il reste malgré tout un enfant neurotypique en souffrance. Comment faire? Je tiens à noter que certains de ses enseignants, comme l’année dernière, avaient parfaitement compris qui était cet enfant et sa « sur sensibilité » etc… Il a commencé à voir une sophrologue et c’est assez mignon, car il adore y aller, cela le soulage beaucoup… Mais que faire pour que l’école comprenne sa différence, même sans le tampon HPI? Merci de votre aide, nous sommes assez désespérés….
Bonjour Mme,
Merci pour votre témoignage et je comprends que vous vous sentiez inquiète pour votre enfant, je mesure combien cela doit être difficile.
Pour vous donner un premier élément d’information (à prendre ou à laisser selon que cela corresponde ou non à votre situation) : Le HPI étant défini comme une grande capacité d’adaptation, il ne prédispose pas à la souffrance et à un comportement atypique. Et selon la littérature scientifique, il ne semble pas y avoir plus d’enfants hypersensibles parmi les HPI par rapport à la population générale. Parfois, lorsque le fonctionnement de l’enfant n’est pas compris par les enseignants, qu’il y a des modes de pensées atypiques et des réactions ou attitudes difficiles à comprendre, il peut y avoir un trouble du neurodéveloppement (avec ou sans HPI) ou une souffrance psychique autre. Il existe plusieurs troubles du neurodéveloppement comme le trouble de la communication sociale (trouble de la pragmatique du langage), le trouble de l’attention, etc.
Par ailleurs, avoir un score à 120 au test de QI montre des habiletés intellectuelle au-dessus de la norme d’âge. Pour vous donner un repère théorique : QI dans la norme entre 90 et 110, dans la norme élargie entre 80 et 120, QI au-dessus de la norme d’âge à partir de 120 et on parle de HPI à partir de 130.
Si la sophrologie aide votre fils, c’est déjà très bien. Vous pouvez aussi vous rapprocher à nouveau de la psychologue qui avait fait l’évaluation, peut-être pourra-t-elle indiquer quelques préconisations pour l’école ? L’anxiété de performance, à elle seule, peut nécessiter des aménagements scolaires. Parfois, la parole des professionnels peut venir en soutien de celle des parents pour faciliter le lien avec nos collègues enseignants.
Dans tous les cas, je vous souhaite du bon dans votre parcours.
Bien à vous, Estelle Joguet